Espace Paul Ricard Paris - 1999
« Secrets de sacs » selon Martine Mougin
Espace Paul Ricard, Paris 1998
« Sacs aux féminin »
La vérité n'est plus au fond du puits,elle est dans le sac des femmes bien sûr. Car, d'une part le sac est d'essence féminine comme le montre, à l'envie, l'homme qui en porte et d'autre part il y a belle lurette que la Baubô de Nietzsche a montré, en relevant ses jupes sur son sexe peint en visage, que les femmes ne croyaient plus en la nue vérité. Pudeur oblige, le scepticisme féminin se voila longtemps. Mais, aujourd'hui que les luttes féminines sont apaisées faute de« phalli combattants », la femme peut être vraiment superficielle par profondeur. Exit le puits sans fond du continent noir, vive le petit sac au féminin, ses avatars métonymiques, portefeuilles ou portes-cartes, et ses petits secrets.
C'est ainsi que Martine Mougin surprend la femme de notre fin de siècle, la main, les affaires et le fantasme fondamental dans le sac.
Dans la lignée de la pionnière Bourgeois qui, dès le début du siècle, fit de la sculpture masculine, dure sèche et verticale, un art féminin, mou, humide, rampant ou pendu et de son remarquable épigone Messager qui fait parade de devenir femme de l'art en exhibant ses travaux d'aiguille ou ses Album-Collection, Martine Mougin fait du sac féminin l'emblème de l'humanité postmoderne. Définitivement libéré du souci profond, qui hantait parfois les travaux un rien revanchards de Louise ou d'Annette, la femme de Martine est tout dans son sac qu'elle ouvre avec nonchalance et pudeur sur ses secrets les plus intimes. Ou, pour le dire avec les Guitry, l'affaire, petite ou grande est dans le sac.
Déployée en triptyque ( selon la nouvelle trinité : L'argent, le sac, la femme), l'installation de Martine Mougin met en regard trois profils de femmes (modernes déesses ignorant Paris, qui de dos paraît avoir perdu tout goût), leurs sacs et leurs portefeuilles. Et sur le fond déréalisant de trois couleurs puissamment symboliques : verte, rouge et jaune, elle montre avec force maintes détails et mieux encore que le dernier roman de Milan Kundera, « que le secret est le plus commun, le plus banal, le plus répétitif et propre à tous ». Dans les plis des portefeuilles et sacs apparaissent en effet le mêmes rouge à lèvres, brosse, poudre, cartes, lettres, préservatifs, pilules et photographies de maris, enfants ou amants...mais à l'opposé du ton désabusé de l'Identité qui se moque du geste immémorial des femmes qui « cachent pudiquement ces intimités si lamentablement impersonnelles «, Martine Mougin les distinguent admirablement . En Baubô héraclitéenne, elle enseigne, enjouée,que là aussi, dans les replis émus des sacs de femmes, sont les déesses.
Bernard Lafarge, Université de Bordeaux III
Sources : Aucune